Bien-être animal.

   Le bien-être animal, on en parle beaucoup, au point d’avoir mobilisé le parlement autour d’une loi. Applicable ou inapplicable, comme c’est devenu la règle générale depuis qu’au moindre événement émotionnel qui titille le vibrato des Français le législateur pond une loi dans la foulée. Depuis que ma chatte est devenue la maîtresse absolue de mes jours, et de mes nuits, je suis devenu non seulement son locataire mais aussi son cuisinier, son coiffeur, son maître à danser et son majordome. Je ne compte pas mes heures passées à lui ouvrir et fermer la porte pour qu’elle puisse humer l’air de la cour. Je n’ai pas encore à l’accompagner lorsqu’elle va faire ses besoins dans le jardin mais s’il pleut, je devine à son regard qu’elle me supplie de l’abriter sous un parapluie jusqu’à son petit coin favori. Lui laisser le temps de choisir le bon emplacement, ne pas la regarder car elle a sa pudeur, la raccompagner s’il le faut, telles sont pour elle les vertus d’un bon maître. Encore que le terme de maître ne s’applique guère à cette sorte d’esclave que je suis devenu. Jalouse comme une femme, pardon mesdames, elle supporte à peine l’intrusion dans son domaine réservé de la chatte de la maison voisine. Pas plus qu’elle ne supporte les pies, les moineaux et les mésanges venues en amies picorer dans « son » jardin.
   Au diable le bien-être animal messieurs les députés, parlons plutôt du bien-être des hommes par ces temps de confinement, de covid et de restrictions de toutes sortes. Deviendrai-je à brève échéance le chat de mon gouvernement ? Me préparera-t-il ma pâtée, me fera-t-il jouer avec des bouts de ficelles, m’accompagnera-t-il lorsque je voudrai sortir et qu’il pleuvra, veillera-t-il à ce que les voisins ne viennent pas troubler ma torpeur ? Ce paternalisme, cette emprise sur ma vie future me fait peur quand je lis que dans les sondages une majorité de Français -cinquante-deux pour cent- souhaitent se reconfiner encore et encore…
 
Jean-Bernard Papi ©

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