Jean-Bernard Papi, romancier, essayiste, nouvelliste et poète

                                        Il n'y a de recette de jouvence que le rire.
                       Partageons nos plaisirs. Vous lisez ! J'écris !      

                          
             
                                     OVNI ou pas.

     

      ?
          Essai sur le doute et l'esprit critique
                                                                                                                                                                                                                           

               






 
    En mars 2012 une émission de télévision sur une chaîne française ambitionna de faire le point sur les Ovnis, un "marronnier" comme disent les journalistes parce qu'il refleurit tous les ans. Et en profiter pour faire le point sur les connaissances en Objet Volant Non Identifié  (OVNI ou UFO en anglais) devenu au fil du temps Phénomènes aérospaciaux non identifiés (PAN) sans que cela change grand chose à l'objet. Connaissances imparfaites que nombre d’ufologues en mal de complots attribuent à l'obstruction et à la manie du secret chez certains gouvernements, en particulier ceux des USA depuis l’affaire Roswell en juillet 1947. Il s'agirait de savoirs et de sciences hermétiques que ces états tiendraient cachés du public pour des raisons obscures. Emission de télévision qui ne servit qu’à embrouiller un peu plus le sujet dans l’esprit des téléspectateurs. Cependant l'OVNI était un sujet que j’avais eu la chance d’aborder et décortiquer durant la décennie 1970/1980 quand une épidémie de vision s’abattit sur le Vaucluse et par contre coup sur la France. Tous ceux qui avaient une bonne vue prétendaient en avoir aperçu, en général à la nuit tombée, entre chien et loup.
  L’Armée de l’air, et en particulier les responsables militaires de la base aérienne d’Orange (Vaucluse), devant le flot d'appels téléphoniques et les interrogations des proches, s’en émurent. Après l’aventure qui va suivre, je fus désigné en qualité d’officier mécanicien, plutôt curieux et dépourvu de préjugés, pour recevoir et « traiter » les comptes-rendus oraux, ou écrits, relatifs aux objets volants non identifiés que les habitants de la région voudraient bien me soumettre. À cette époque, précisons-le, le film « Rencontre du troisième type », était encore dans les cartons de Steven Spielberg mais « La Guerre des mondes » film de 1953 qui reprenait le roman de HG Wells était connu. Dans l’esprit de beaucoup, il y avait menace.
  Je reçu donc, durant cette « épidémie » une bonne douzaine de cas, dont des photos prises de jour qui s’avérèrent pour 90% être celles de ballons météorologiques de grande taille ou de leurs nacelles d’instruments de mesure, lâchés près du plateau d’Albion (site des fusées à ogive nucléaire de la Force de frappe française de 1967 à 1999). Durant la nuit, les traînées lumineuses étaient en général des reflets naturels, voire la destruction d’éléments de fusées spaciales, de satellites artificiels, ou plus souvent des météorites entrant dans l’atmosphère. Voire tout simplement des aéronefs, avions ou hélicoptères, qui allumaient leur projecteur d’atterrissage et dont il était facile de se procurer les plans de vol. Notre laboratoire de photographie chargé d'analyser certaines photos possédait, outre des techniciens remarquables, des appareils capables d’agrandir une petite mouette à la taille d’un supersonique. Les 10% des récits restants non élucidés par mes soins étaient transmis à un centre de traitement à Toulouse, ancêtre du GEIPAN actuel, dont le responsable, à l’époque, admettait que pour 5% des dossiers reçus venant de toute la France, il n’existait aucune explication rationnelle, pour le moment. Insistons sur ce "pour le moment".
  Le dossier qui m’est resté en mémoire, et qui fut le premier que j’eus à traiter, ne concernait pas un objet volant du fait car se trouvait « à terre » et rien ne permettait de penser qu'il puisse voler. C'était u
n soir d’été, j’étais de service dans mon bureau. Il devait être aux alentours de 21 heures  quand le poste de garde à l’entrée de la base aérienne me pria de venir afin de recevoir un couple qui demandait à rencontrer le colonel commandant la base ou à la rigueur un officier responsable. J’étais justement là, jeune capitaine, pour suppléer au colonel en ce qui concerne les cas simples ; je les priais donc courtoisement de m’exposer l’objet de leur requête.
  C’était un couple de personnes dans la quarantaine, bien habillés, manifestement à jeun qui s’exprimaient en termes clairs et précis tout en étant un tantinet gênés de m’avoir dérangé. Ils avaient en main une photo polaroid en couleur d’un objet inconnu, photo prise par leur fils de quatorze ans dans une carrière des environs. "Le jeune homme revenait de chez un camarade en vélo quand il avait été intrigué par une violente lueur qui provenait du fond d’une carrière située sur son chemin. Il avait donc pris cette photo avant de se sauver comme un voleur" dixit le père. Les parents dont, suivant les coutumes en vigueur nous avions pris le nom et l’adresse, nous assurèrent que le fiston n’était pas un farceur. Il était encore tout bouleversé par ce qu’il avait vu,  m’assura la maman.
  Les gendarmes auxquels ils avaient eu à faire en premier, les avaient invité à se renseigner auprès des aviateurs pour le cas où un hélicoptère se serait égaré ou tombé en panne et peut-être leur fournir des explications sur l’objet de la photo. Vérification faite tous nos hélicoptères étaient au parking et aucun dans la région n’était signalé posé en catastrophe. Une base aérienne de nuit comme durant les jours chômés n’est jamais une usine endormie, je savais qu’un officier contrôleur aérien (de quart) et un officier pilote veillaient aussi. Je leur demandai de se joindre à nous et de nous retrouver dans la salle de briefing de la 5ème escadre de chasse. Laquelle salle possédait ce qu’il fallait d’écrans, d’épidiascopes et de rétroprojecteurs pour visionner la photo en détail.
   Lorsque tout le monde fut installé je projetais la photo sur un écran de 1m×1m. Au centre de la photo, occupant 1/3 de sa largeur et 1/3 de sa hauteur, on pouvait voir une sorte de marmite inversée, percée de quatre hublots ovales, plutôt petits, bien découpés et de forme régulière placés au 2/3 de sa hauteur. Les hublots laissaient voir une lumière vive et dorée à l’intérieur de l’objet. Sous la « marmite » un flux de lumière d’un bleu intense, que le labo photo estimera à 3000 degrés, température qui n’était pas facile à produire sans matériel spécial, mêlé de jaune donnait l’impression que l’objet s’apprêtait à décoller à la verticale. Les cailloux du sol au plus près du photographe qui était probablement accroupi, visibles grâce au flash et sur une certaine distance, une dizaine de mètres, montraient une décroissance de taille due à la perspective. L’objet, la marmite, était bien plus loin, à cent ou deux cents mètres au moins selon nos estimations. Autour de l’objet et derrière lui c’était la nuit, nous parviendrons le lendemain à éclaircir la photo jusqu’à ce que des sortes de falaises grisâtres apparaissent de part et d’autre.
  Que dire ? Pour moi il ne s’agissait pas d’un aéronef connu et encore moins d'un hélicoptère. L’officier pilote pensait comme moi tout en assurant qu’il n’avait jamais croisé de telles choses en l’air mais qu’il se murmurait que d’autres en avaient rencontrées de plus ou moins semblables. La consigne  pour le pilote étant alors de vérifier son masque et son arrivée d’oxygène, ce gaz à l'état pur et en quantité insuffisante pouvait provoquer des visions. L’officier contrôleur resta évasif lui aussi tout en signalant qu’il arrivait parfois que des traces sur les écrans de radar des contrôleurs témoignent du passage d’objets à très grande vitesse capables de changer de cap en une fraction de seconde. Faute de mieux on les dénommait « faux échos radar ». Bref nous nous comportâmes comme des gens sérieux et désireux de comprendre. 
   Visiblement nos visiteurs étaient déçus, ils s’attendaient à ce que nous déclenchions une opération de grande envergure afin de poursuivre l’intrus. Peut-être pensaient-ils aussi que nous étions des familiers de ce genre d’objet et que nous leur donnions une explication romanesque et certifiée « Armée de l’air » ? Peut-être imaginaient-ils autre chose… Ils furent néanmoins incapables de nous dire dans quelle carrière leur fils avait vu l’objet mais promirent de nous le faire savoir au plus vite. S’il y avait des traces, dis-je, il fallait au moins s’y rendre d’urgence. Hélas ! Je n’eus pas l’information et le lendemain matin, arrivés de bonne heure ils se rétractèrent et reprirent la photo. Ils ne voulaient pas que leur fils soit traumatisé par l’importance que prenait, ou allait prendre, l’événement, argumentèrent-ils. Supposition gratuite car rien n'indiquait que nous allions réveiller le ban et l'arrière ban des militairtes  pour enquêter, le contraire était plutôt dans les standards de l'Armée de l'air.
   On peut supposer que l’adolescent les avait bernés et que pris de peur, il avoua la vérité lorsqu’ils revinrent chez eux. Cela démontre, si c’est nécessaire, avec quelle prudence il faut examiner ce genre de fait. Cependant j’ignore encore comment, probablement aidé par son camarade, il a réussit à produire un objet si criant de vérité. Certainement d’une manière très simple que j’aurais aimé connaître. À moins que ce soit un engin de chantier ( ?) en plein travail et pourquoi pas un objet inconnu malgré que personne ce soir-là ne vit ou ne signala une quelconque marmite dans le ciel. Toutes les hypothèses sont permises… Et il n’est pas interdit d’imaginer.
  Pour conclure je voudrais signaler ce qu'écrivait en 1956, feu Jacques Bergier, érudit, co-auteur du "Matin des Magiciens" et grand chasseur d'inexplicable :"C'est le phénomène des "soucoupes volantes", écrit-il, qui met à la fois bien en évidence la nécessité du doute et l'obstination incroyable des gens. Au moment où j'écris, la recherche des soucoupes volantes est devenue pour un certain nombre de gens, une véritable foi, une recherche d'êtres supérieurs capables de venir à notre secours. Le soucoupiste admet littéralement n'importe quoi. Un livre paru récemment sur le sujet : "Alerte dans le ciel " par Charles Garreau (en 1956) est illustré avec des photographies qui sont censées représenter des soucoupes volantes. En fait il s'agit de reproductions extraites de l'Astronomie Populaire de Flammarion qui représentent des galaxies, des nébuleuses spirales et même une comète. Un "Annuaire des soucoupes volantes" a reproduit intégralement une nouvelle de science fiction, "Top Secret" de David Grinnell paru dans l'édition américaine de "Fiction". L'auteur de l'annuaire avait cru que c'était un rapport exact !"
  Tout amateur d'objets volants non identifiés devrait apprendre ce texte par coeur et se le réciter avant de partir chasser le martien. 
"Le doute, écrivait plus loin Jacques Bergier, a donc un rôle social important : celui de combattre les fausses croyances et les fausses sciences." Cette dernière phrase prend encore plus d'actualité aujourd'hui, notre époque étant riche en fausses nouvelles (Fakes news) en mensonges politiques baptisé "vérités alternatives", de demi-vérités ou de vérités hyperboliques. Témoin ce brave plouc qui croyait dur comme fer qu'Hilary Clinton dirigeait un réseau pédophile dans une pizzeria de New York et qui fit irruption dans cette pizzeria un fusil à la main. Cela se passait durant la campagne présidentielle US en 2016. Ou encore cet autre "redhead" (nuque rouge) qui croyait que le pape François soutenait la candidature de Donald Trump à la présidence des USA.
  Doutons de ces pseudo informations qui parcourent les réseaux sociaux, riches en fabriques de bobards ou en prétendus complots, sur Facebook ou Twitter par exemple, qui prétendent nous faire prendre des vessies pour des lanternes et des voyous pour d'honnêtes gens ou vice et versa ! Pour ce qui est du complotisme cher à nos amis du monde arabe, lesquels victimes se voient cernés par tant de féroces mécréants auteurs de supposés complots venimeux à leur encontre. Certes tout le monde n'a pas l'esprit critique d'un philosophe ou d'un homme de science mais il suffit de se poser quelques questions de bon sens comme par exemple : à qui profite le bobard ? Et pourquoi ? etc. Le plomb ne peut-être changé en or, on ne voit pas l'avenir dans une boule de cristal pas plus que n'existent les sorciers (malgré une recrudescence du métier aujourd'hui). Un peu de bon sens tout de même...

©  Jean-Bernard Papi  04/2012 & 06/2019                                                                                   
                                                                                                                                                           Horrible chose volante ?
Rencontre du 3ème type.