Poèmes sans Moi. Soirée au jardin.
Quand danse autour de moi l’entêtant parfum
des iris et des roses
et qu’un voile bleuté descend sur mon jardin
je me sens tout chose
et m’en aller je n’ose.
Quand le souffle de la ville au loin s’amenuise
à l’instant de Vénus, alors
tous les calices s’emballent et je me grise
de couchant et de vin fort
mon verre est une goutte d’or.
Le chat guette ma caresse sans y croire
la dernière gorgée de vin
me rend indulgent et me comble d’espoir
le monde est beau le soir
dans mon jardin.
Jean-Bernard Papi ©
Balade d’une poétesse.
Poétesse consacrée au gynécée
Et chef de chœur chez les petits oiseaux
Écoute l’alouette du matin, vois la paruline azurée
Le phénix et la foutraque des roseaux,
Comme ils sont beaux !
Pose ta lyre, c’est ton jour de sortie
Va herboriser tout au long du ruisseau
Tu y cueilleras la pâquerette à béton et la verte ortie
Si bonne et douce pour tes vieux os
Et Satyre pour toi seule y jouera du flûtiau.
Comme la nature est belle, hors tempête et orage
Et comme sont gentils les bestiaux
Qui, pour trois fois rien, animent nos pâturages
La vache langoureuse enlace son taureau
Berger sa bergère et chamelière son chameau.
Mais à ce voir ta belle âme de tristesse frissonne.
Car celui qui te chamboula le cerveau
Qui te fit servante coquine et même polissonne
Pour Tanger ou Alger a repris le bateau
Carbonisant tes rêves et tes chants nuptiaux.
Ils sont pourtant touchants tes vers ô poétesse
Que tu les joues grosse caisse ou pipeau
Tes plaintes sont exquises, piquantes, je le confesse.
Quand nature et amour sortent de ton chapeau
Tu te moques joliment des conseils de Boileau. Jean-Bernard Papi©
Une île
(sur le séisme de 2010)
Il est une île dont le nom fuit
une juste renommée
Haïti, c’était comme Tahiti
mais sans les vahinés. Cette île fut celle des rêveurs.
Aujourd’hui, peintre ou savetier
le nègre y compte pour du beurre.
Chimères, macoutes et Duvalier.
Pour ce désastre de la terre
fidèles chantez, honorez Dieu,
le pape est un joyeux compère
et le Ciel du genre facétieux.
Quand tu loues la bonne nature
qui pourvoit à tous nos besoins
écolo, ta plume fait des ratures.
Mère Gaïa ignore les Haïtiens.
Il y aura d’autres Haïti
pour larmoyer tous ensemble,
médias, gens de tous les pays
que les beaux drames rassemblent.
©Jean-Bernard Papi
Okba.
Okba, un charlatan crépusculaire
(comme dirait Apollinaire)
vante de son Dieu la mansuétude
tandis qu’à son côté un enfant à l’étude
nettoie un fusil mitrailleur.
Il se fait appeler « Okba le maous ».
Au lit il se sait le meilleur.
Le voici endormi qui rêve au ferdaous
Au ferdaous, d’Allah le paradis,
soixante douze vierges, des houris
plus belles que la reine Kahina,
l’attendent. Au ferdaous Aïcha
l’invitera chez elle à boire son vin
(Et pas la piquette de Mohamed
ce flemmard qui ne fait rien de bien)
un vin mûri au soleil du bled.
Un vin qui a du cœur et de l’âme.
De ses quatre femmes
la plus laide a pour nom Zineb
elle fut jadis mariée à ce clebs
son fils adoptif, maudit soit ce Zaïd
qui se prennait pour un caïd.
et fricotait avec un mécréant
un chrétien appelé Joseph le Paria.
Okba a réglé l’affaire dans le sang.
il n’a fait qu’appliquer la charia.
Jean-Bernard Papi ©
à suivre,