Poèmes sans moi.
Sur la route.
Elle avait exigé un baiserla route était vide
la voiture rapide
juste un, pour pardonner
Une dispute de rienà propos de quoi, de qui ?
Soudain
dans sa tête comme un cri
pas même un coup de frein
De mille tonnerres
mille éclairs
Le ciel s’abat puis glisse
la grande course de la faux
Et dans leur bouche déjà la terre
tandis qu’autour des blés complices
naissent à foison les coquelicots.
Ô toi, cesse de guetter ; quitte ce seuil
arrête ce balancier et ferme tes volets
car voici venir à toi cent ans de deuil.
Non ! crie la mère, non ! Ils seront là bientôt
écoutez sur la route chanter le bel été
dans une heure, ou dans deux, je verrai leur auto.
Jean-Bernard Papi ©
Armand.
Le bois craque dans la cheminée
l’heure va à pas de loup Dessin Cabu
en attendant l’été
de la bûche au verrou.
Joie et flamme animent tes yeux
et un peu de tes mains.
J’écoute le bruit joyeux
des toilettes de satin
Que tu plies et défroisses, égrenant :
baptême, communion :
Te souviens-tu d’Armand ?
Comme il était mignon !
Ainsi, comme le feu qui nous réchauffe
fument les souvenirs.
d'Armand devenu beauf
mais pour toi, il y a pire.
Jean-Bernard Papi ©
Aphrodite 1
Je fus la voile blanche ancrée au fond des terres
Le temple où s'unirent Jason et Déméter
On y chantait Virgile et Platon et Pindare
J'étais le lieu des femmes. Puis vinrent les barbares
Celui-là dit à l'une :
"Ta convoitise te poussera vers ton mari, et lui, dominera sur toi."(1)
Cet autre dit aux hommes :
"Vos femmes sont pour vous un champ de labour, allez à votre champ comme vous le voudrez..."(2)
Alors tout nous sépara.
Il fallut recoudre brin à brin la toile déchirée
me voici aujourd'hui comme un tendre échiquier
l'amour est jeu mais aussi liberté.
J'ai foi encore en Epicure
ne laissons pas entrer l'assassin dans nos murs.
Jean-Bernard Papi ©
(1) La bible
(2) le Coran
Le même poème illustré par Dominique Payraud
Mon Rossignol.
À ma Mémé.
Pour toi cette ode au rossignol
une petite fleur de poète
un machin un peu bébête
quelque chose… d'agricole.
Un poème pour tout dire
qui ne te fasse pas de peine
qui parle d'amour et pas de haine
des vers pour te faire…jouir.
Oiseau médiéval celtique
Patatras ! Je suis incorrigible,
je retombe dans la gaudriole
même dans une ode au rossignol.
J'ai dû me péter un fusible
Quand je tétais ma maman
ou dans le lit des grandes filles
qui m'empêchaient de jouer aux billes,
à moins que ce soit au régiment.
Mais je vais tout reprendre à zéro
et m’installer dans un quartier
où fleurissent les cocotiers
enfin, là où chantent les z'oiseaux.
J’y pondrai un fameux papelard
intitulé : Ode au rossignol
qu'on apprendra dans les écoles
et qu'on vendra à Gallimard.
Jean-Bernard Papi©
à suivre,